La consultation gynécologique chez les jeunes filles
Sondage et focus group sur les connaissances, représentations et expériences des jeunes filles francophones sur la consultation gynécologique et leurs droits lors de celle-ci
Dans le cadre d’un projet en Promotion de la santé, un groupe d’étudiant.e.s a réalisé un diagnostic des connaissances, représentations et expériences des jeunes filles francophones sur la consultation gynécologique et leurs droits lors de celle-ci. Ce diagnostic a permis d’établir par la suite certains besoins concernant ce public cible et d’élaborer la campagne de sensibilisation «Une consult’ gynéco en toute égalité». Ce diagnostic a été réalisé via un questionnaire en ligne relayé sur Facebook.
Informations générales
Cette étude à réussi à rassembler 126 répondantes. La moyenne d’âge de l’échantillon est de 21 ans, avec un minimum de 13 ans et un maximum de 29 ans. La majorité des répondantes sont âgées entre 20 et 24 ans. Toutes les jeunes filles ayant répondu au questionnaire ont déjà eu une première consultation gynécologique.
Les principaux motifs de consultation concernent la contraception (45,7%), les troubles menstruels (28,3%) et le cycle menstruel (10,2%). Les participantes évoquent également le «check up» (4,7%), des questions générales de sexualité (4,7%), les IST (seulement 3,1%).
Dans le diagramme ci-dessous, les étudiantes se sont intéressées au type de structures dans lequel se rendent les participantes. On note que seul 12% de l’échantillon s’est rendu chez un médecin généraliste. Ceci peut être lié :
- À un manque de connaissance concernant la capacité du médecin généraliste à effectuer un examen gynécologique ou à prescrire une contraception.
- Mais également un manque de connaissance des structures de planning familial comme structure proposant un suivi gynécologique.
Généralement, la mère est la personne qui a encouragé à aller consulter (60% des cas), mais cela peut aussi être un autre membre de la famille (11%), le/la partenaire (7%).
Les représentations
La première thématique abordée concernait les représentations des jeunes filles concernant:
- L’âge idéal pour la première consultation gynécologique,
- Les acte(s) obligatoire(s) durant la consultation,
- Les droits,
- L’accès aux informations et les sources d’informations.
Concernant l’âge idéal pour la première consultation selon les jeunes filles, la majorité de l’échantillon a conscience qu’il n’y a pas de moment idéal pour se rendre à la première consultation gynécologique bien qu’un tiers pense qu’il se situe entre 14 ans et 17 ans.
Lors de la revue de la littérature réalisée en amont du sondage, les étudiantes se sont aperçues que peu de personnes avaient conscience qu’aucun acte n’était obligatoire lors de la première consultation. Cela est également observé dans l’échantillon : uniquement 17% des personnes interrogées ont répondu qu’aucun acte n’était obligatoire contre 81% qui pensaient qu’une série d’actes médicales l’étaient.
Malgré un manque de connaissance concernant les actes(s) obligatoire(s), pratiquement l’entièreté de l’échantillon a conscience qu’un acte peut être refusé (97%). On retrouve ici une certaine dissonance avec la question précédente: les répondantes pensent à la fois pouvoir refuser un acte tout en identifiant une série d’actes comme obligatoires.
Le groupe d’étudiantes a voulu identifier quel acte les jeunes filles considèrent comme obligatoire selon la source d’informations dont elles font l’usage. Il est intéressant de voir avec quelle source d’informations, les personnes ont répondu «aucun». 18% des personnes qui ont utilisé comme source d’informations «internet», ont répondu qu’aucun acte n’était obligatoire, 17% des personnes étant informées par leurs généralistes et leurs amis, 7% qui ont comme source d’information leurs parents, 0% qui ont comme source d’informations leurs gynécologues.
Plus largement, le fait d’être trop peu informée est revenu à plusieurs reprises au niveau du questionnaire. 48% des répondantes ne pensent pas avoir reçu suffisamment d’informations par rapport à la première consultation, contre 45% qui estiment avoir été suffisamment informées. Les sources d’informations sont très diversifiées, tel qu’on peut l’observer dans le diagramme ci-dessous.
Cependant, la grande majorité des jeunes filles considèrent qu’il n’y a pas de difficulté à en discuter avec leur entourage, même si elles sont nombreuses à aller chercher leurs informations sur les réseaux.
Les expériences
La deuxième thématique abordée lors de cette enquête sont les expériences personnelles des participantes.
À la question «vous êtes-vous déjà sentie mal à l’aise lors d’une consultation», plus de la moitié des répondantes ont répondu que «oui». Cependant, les réponses positives au fait de se sentir mal à l’aise lors d’une consultation tendent à décroitre avec l’âge.
Les raisons de leur malaise étaient diverses : le fait de se sentir intimidée par le/la praticien-ne ou d’être stressée concernent la moitié des motifs de malaise.
Il est important de noter qu’une majorité des jeunes filles, 88% expriment ne jamais avoir reçu de remarques déplacées de la part de leur praticien contre 10% des jeunes filles l’ayant vécu.
D’un point de vue de la contraception, dans la grande majorité des cas (94%), une contraception a été prescrite, majoritairement la pilule. La contraception semble adaptée aux besoins de 75% des jeunes femmes mais ne répondaient pas aux besoins des autres participantes. Il est par ailleurs assez rare d’avoir eu une présentation de tous les moyens de contraception avant qu’elle soit prescrite (39%).
Le groupe de recherche a effectué un tableau croisé entre les motifs de la visite et la prescription d’une contraception. Cette analyse montre que 38,5% des jeunes femmes qui venaient pour un motif autre que la contraception, a malgré tout reçu une prescription. Par ailleurs, 15% des répondantes ayant eu une prescription de contraception, ne la considère pas adaptée à leurs besoins.
Quelques éléments qualitatifs non-exhaustifs
A la suite du sondage, un focus groupe a été proposé aux participantes. Celui-ci n’a accueilli que deux participantes.
- Elles ont soulevé le manque de connaissances et les sources d’informations manquantes.
- Ce manque de connaissances implique par ailleurs l’impression de ne pas être en mesure de remettre en question le corps médical ni même de les interroger. Cela soulève la question de la légitimité médicale exprimée à plusieurs reprises lors du focus groupe: du fait de la formation suivie par les médecins, il y a une certaine confiance instinctive dans les actes qu’iels exercent, la remettre en question impliquerait de remettre en doute leurs connaissances et leurs compétences. La légitimité médicale peut être considérée comme un obstacle à la discussion selon ces jeunes filles.
- Le manque d’explications et d’écoute lors des consultations est un point qui est revenu assez régulièrement lors du focus, notamment dû à l’obstacle mentionné ci-dessus mais également dans la relation entre le médecin et son patient. L’importance d’une relation de pairs et de confiance a été appuyée.
Si les éléments formulés lors du focus groupe permettent d’affiner ou nuancer certains éléments identifiés dans le sondage, ces résultats ne font pas lieu de généralité.
La synthèse des besoins du public-cible
L’analyse des données récoltés via le sondage a permis d’appuyer des éléments pointés dans la littérature. Le manque de connaissances concernant la consultation gynécologique et les droits des jeunes femmes lors de celles-ci est particulièrement mis en lumière. Il a pu être ciblé, par ailleurs, un manque de connaissances sur les actes obligatoires, l’âge idéal et les structures et personnels soignants offrant des consultations gynécologiques.
On peut également remarquer une systématisation de la prescription de pilule comme moyen de contraception de la part des professionnels soignants, souvent sans présenter tous les moyens de contraception disponible. De plus, pour 15% des répondantes au questionnaire, la pilule n’était pas un moyen adapté.
Enfin, il a pu être identifié que 10% des répondantes ont subi des remarques déplacées lors de la consultation. Ces remarques pouvaient toucher à l’identité de genre et/ou à la religion de certaines patientes. Ce chiffre n’est pas négligeable et est une première prévalence en Belgique d’un type de VGO selon la typologie du HCE (2018): propos porteurs de jugements sur la sexualité, la tenue, le poids, la volonté ou non d’avoir un enfant, qui renvoient à des injonctions sexistes.